Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

28 septembre 2006

Jospin, VGE, un même problème avec la réalité


Deux retraités récalcitrants de la politique. Deux profils on ne peut plus différents.
Jospin, commençons par lui, nous explique, hier sur RTL, pourquoi, finalement, il renonce à briguer la candidature socialiste. Je résume: pas de rassemblement, donc ne pas en plus ajouter la division à la divison, tralala...En fait, sa petite opération TCS, Tous Contre Ségolène (mais derrière moi) a échoué lamentablement. Ni Fabius, ni même DSK ne veulent entendre parler d'appeler M. Jospin-le recours pour éviter au PS et à la France la "cata" Ségolène. Ils veulent tourner la page, passer enfin à la génération des quinquas (les quadras, eux devront encore attendre) ou alors ils pensent que ce ne serait pas une telle "cata", et dans les deux cas ils ont raison. Ils préfèrent se ramasser une gamelle que d'appeler papa. Ce sont des grands garçons.
"Jospin a été un bon premier ministre." C'est le genre de théorème que personne, ou presque, n'ose discuter. Peu importe que Jospin ait calé sur à peu près toutes les réformes douloureuses, comme les celle des retraites, qu'il se soit contenté de profiter de la croissance en créant des emplois subventionnés. Qu'il ait été incapable de s'adresser au peuple, et à la gauche en brisant la doctrine "niniste" dont le pays crève depuis 25 ans.
"Jospin est un homme honnête et intègre." Autre postulat. C'est sûr qu'à côté de Chirac...Mais quand même cette honnêteté connaît ses limites. L'honnêteté vis à vis de lui-même, notament, n'est pas son fort. Avez-vous déjà entendu Jospin reconnaître ne serait-ce qu'une seule erreur? Non. Jospin s'estime forcément infaillible, le meilleur de tous. Cela lui donne cette manière caractéristique de rendre les autres responsables de ses faux pas, de ses manques. Exemples? Les retraites, encore. La faute du parti. Sa défaite en 2002? La faute de Chevènement. And so on...Sans même s'apesantir sur le fameux: "Je n'ai jamais été trotskiste, vous confondez avec mon frère."
Enfin, son retrait de la vie politique. J'appréciais beaucoup Jospin, mais ce jour là, je l'ai vraiment trouvé sublime. Ça ne s'était jamais fait, en France. Enfin, un homme politique reconnaissait sa responsabilité et se retirait dignement, admettant clairement le verdict populaire. Jospin, malgré ses indéniables qualités et le très faible score de Chirac n'avait réussi à convaincre ni le peuple, ni même la gauche. Il en tirait la leçon immédiatement. Quelle gueule ça avait! Mais voilà, quatre ans d'île de Ré plus tard, c'est le reniement. Comment peut-on n'avoir rien fait pour son parti pendant 5 ans et ensuite prétendre revenir à sa rescousse, sans que personne ne vous y ait appelé? Quelle genre de morale est-ce là? Non, décidément, j'ai compris à ce moment là que Jospin nous avait abusé en nous laissant croire qu'il avait une stature morale supérieure.
Et ce matin enfin, alors qu'il venait d'annoncer la seule décision qu'un homme qui a gouverné la France pendant 5 ans (imagine-t-on, en effet, Jospin sur une estrade débattant en public avec ses anciens ministres?) pouvait prendre, le coup de pied de l'âne. Cette façon de balancer des vacheries l'air de pas y toucher!
Question: Allez vous soutenir un candidat en particulier?
Réponse. On verra je ne sais pas, je parlerai plus tard, mais il y a celui, ou plutôt celle que je ne choisirai pas". Et lorsque JM Apathie lui demande les raisons de ce "Tout sauf Ségolène", il répond avec aplomb:..."Non, je ne dirais rien de négatif sur qui que ce soit". Tant d'hypocrisie, même en politique, j'ai rarement vu ça.... Elle a raison Ségolène Royal, la machine à perdre est bien enclenchée.
Jospin s'inquiète de la pente sur laquelle se trouve les socialistes, qui les pousse à suivre l'opinion plutôt que leurs convictions. Outre que ce constat suppose que la présidente de Poitou Charente n'en a pas, qui soient aussi respectables et discutables que les siennes ou celles de Fabius, voici ce que les socialistes auraient du faire, pour échapper à la "démocratie d'opinion": En 2002, se donner un an pour désigner un(e) patron(ne) du parti qui aurait été clairement chargé(e) de les représenter dans l'opposition puis aux élections suivantes. Cela aurait laissé au premier secretaire 4 ans pour forger sa crédibilité, convaincre de ses qualités, conforter sa côte de popularité. C'est ce que font toutes les démocraties européennes. Pas la France, et cela nous rapproche du système américain dont nous prétendons nous distinguer. Au lieu de cela Hollande a reçu un mandat ambigu, celui de servir de dénominateur commun plutôt que d'être un réel leader. Il n'a donc pas su imposer son autorité, malgré d'étonnantes qualités d'opposant. Supprimer l'élection du Président au suffrage universel et adopter un régime parlementaire, primo-ministériel serait l'idéal, mais on peut attendre cela pendant des lustres sans rien changer. Autant changer les pratiques, par l'exemple.


Le rapport avec Giscard? J'y viens. Et si le "pouvoir" avait tout simplement gâté "la vie" de ces deux hommes d'Etat?
Giscard sort le dernier tome de ses mémoires, consacré à la période de son septennat. Il aborde les raisons de sa défaite en 1981, dont il a mis, on le sait, longtemps à ce remettre. On découvre que, s'il s'exprime volontiers sur le sujet, il continue d'éviter toute analyse qui le conduirait à se remettre en question. Comme avec Jospin, ses échecs trouvent leur explication dans le comportement des autres, qui n'ont jamais été dignes de lui. C'est soit la faute de Chirac qui l'a trahi, soit celle des "cloportes" (sic) de Mitterrand qui avaient orchestré l'affaire des diamants (" des petits cadeaux d'Etat..."). Giscard est passionnant lorsqu'il livre son témoignage sur l'époque. Son récit de sa visite à Mitterrand mourant est poignant. Mais sur lui-même, il est consternant. Outre que le récit de la trahison chiraquienne est connu depuis des décennies, que nous dit-il? Qu'il était bien le meilleur, qu'il aurait dû gagner et en qu'en gros, depuis 25 ans, personne n'a été à sa hauteur. Même pas Mitterrand? Non, car s'il accorde qu'il avait bien "le niveau", il a raté les réformes nécessaires à la modernisation de la France. Là encore ce n'est pas tout à fait faux, Giscard est intelligent on ne peut pas lui enlever ça. Mais cela passerait mieux accompagné d' une auto-critique (davantage que "j'ai fait mauvaise campagne..."). Mais de cela, tout comme Jospin, il est incapable. Car leur intelligence leur a dissimulé l'essentiel: comme toute chose qui fait communément défaut, elle inspire la crainte si elle n'est pas accompagnée de qualités plus émotionnelles. Question que je me suis toujours posée: Giscard arrive-t-il à dormir en se disant qu'il a envoyé à l'échafaud Christian Ranucci (le pull-over rouge) qui était très vraisemblablement innocent? Il ne nous le dit pas. Au lieu de ça, voici ce qu'il nous dit après avoir remaché toute cette période, qui soit dit en passant n'interesse plus guère personnne: Il se reproche de ne pas avoir fait un référendum sur le quinquennat, et de s'être représenté pour 5 ans. Il n'a pas d'autre problème de conscience. Ce n'est pas de son niveau.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Mon commentaire n'est pas très constructif mais bon : billet excellent.

Anonyme a dit…

Tu as un peu la dent dure sur le camarade Lionel ;-)

http://postscriptum2.canalblog.com/archives/2006/09/28/2779450.html